Ciel soleil se
Mirent
Dans la mer
En cherchant les reflets
Tu vois l’ombre géante foncée
L’aileron fend le temps
Comme un fruit sec
En éclats étranges
Sa solitude toujours plus fluide
Se fond aux flots
Tu n’y vois que du feu
Ciel soleil se
Mirent
Dans la mer
En cherchant les reflets
Tu vois l’ombre géante foncée
L’aileron fend le temps
Comme un fruit sec
En éclats étranges
Sa solitude toujours plus fluide
Se fond aux flots
Tu n’y vois que du feu
Tu tisses
Et puis te drapes de couleurs
Qui en soies s’évaporent
Il ne reste de toi que l’essentiel
Sans nom
De la forêt dont est fait ton esprit
Galope d’essences en essences
L’individuelle beauté
Invisible à l’œil fardé
L’oiseau de roche échappé de l’écume
D’une vague
Frôle des ailes la canopée mentholée
Tu files
Aux carrefours des grilles
rouillées
encerclé d’ondes de chocs
le caillou volcanique sombre
répercute sa chute
dévoile son envolée
la réalité ou simplement le constat de ses existences passées
il m’arrive toutes les nuits d’avoir peur d’un espace si petit qu’il ne se mesure même pas
en nanosecondes
d’avoir froid de le laisser galoper seul le rocher
l’accident que le hasard s’efforce de reproduire
la brèche dans laquelle s’enfonce le rêve en modulant le souvenir
l’empêche d’être oublié recouvert de neige
pourquoi
alors que je n’ai pas le pouvoir de modifier la trame
Le rocher a fixé à jamais le bouillonnement de sa naissance.
On pourrait s’imaginer qu’il figure les plis d’une vague, les remous d’une tempête.
Cet éclaboussement avec le temps s’est très peu laissé éroder:
ses lignes sont souples, ses profils changent.
La lumière lui permet d’évoluer, d’écrire ce qu’il veut.
Parfois, il décrit une baie, le sable, la vallée et explique avec lenteur
que le ciel bleu est aussi malléable que la mie du pain chaud sortant d’un four.
Quand le monticole bleu se pose sur l’effervescence la plus fortement formulée,
le rocher soudain fait silence
le profil à lui seul témoigne de ce que s’est d’être un oiseau.
Mieux que n’importe quel chant, sifflement, paroles, le mot solitaire
qui désigne sa personne n’existe pas
Cela,
le rocher le sait fort bien.
Dans le ciel, juste le souffle bleu des vagues et royalement, le milan. De ses plus belles plumes, il inscrit une ombre. Entre elle et lui, le fil d’une toile d’araignée. Se suspendent alors qu’il accorde ses phrases, les battements d’ailes du papillon jaune, les battements de coeur du batracien, du rongeur, de la couleuvre à collier.
Quand l’ombre est enfin ajustée, le monde se suspend. On l’oublie pour remarquer que derrière la colline un troupeau de nuages broute et puis sans doute s’endormira sur le versant sombre de la montagne. Leurs rêves ne se dissiperont pas avant ce soir.
Plusieurs fois le regard du milan croise celui du petit cadavre. Il y aurait comme une passation de pouvoirs. Aurait-on cessé les combats? L’arbre grince, un oiseau signe le contrat en se faisant passer pour un cobra. Le papillon reprend sa promenade de pétales, les reptiles regagnent les plis ensoleillés du muret. Sur les branches des haies parfois se croisent les doux regards noirs de quelques rongeurs si petits.
La feuille fera semblant d’avoir tout oublié, il faut que tout recommence, même la brièveté.
Debout sur le dos de la colline
quelques indiens et leurs chevaux
des champs de plumes et de cris
dévalent les pentes et avalent au passage
des morceaux de ciel des bribes de soleil
ailes ouvertes filtrant la lumière le milan
les moléculaires moucherons les fils des épeires
En mer d’écueil en écueil les vagues évitent la mort
et moi tous les mots qui font peur
Ce ne sont pas quelques mots
Acides secs urticants
Qui la feront disparaître
Elle s’apaisera la passagère en moi
Elle se fera silence jusqu’à nouer ses bras
Tordre ses sens pour qu’on ne l’aperçoive pas divaguer
Et puis gavée tellement brûlante
Elle naviguera médusée
à nouveau parmi les cendres les braises mourantes
Semblant être libre
Alors que vibrent des verbes qui la malmènent
C’est sans doute trois fois rien
Elle comme une anguille
Comme un batracien
Impossible à dire quel monde lui convient
Une vague montre son coeur des profondeurs, un coeur lisse et brillant, un coeur d’algues bleues. Les autres se contentent de montrer les dents du sourire, les dents de lait que fait pousser le vent quand il nait longuement.
Les vagues avancent et n’arrivent nulle part. Elles reprennent incessamment la partition de leurs naissances au large et de leurs déclinaisons dans la baie. Comme l’oiseau s’essaye à la même succession de notes, les seules en mesure de réveiller l’énorme machinerie du jour.
Mon réveil répondait aussi au besoin de revenir sur un monde qui a cessé d’exister mais qui revient au gré du rêve imbiber chaque instant présent. Un monde où les petits cailloux blancs cueillis dans les rondeurs des vagues qui prennent pieds sur la plage restent précieusement mouillés de lumière. Un monde où ma solitude n’a plus rien de solide mais va glissant jusqu’à ta main.
Ta paume comme un soleil mûr. Ta paume m’apportant un vent ponant pour rassembler les voiles et nourrir les brumes pour qu’elles s’en aillent.
Ce qui guide entre les vagues mes promenades magiques n’a de consistance que si je parviens à attraper les mots, à ne choisir que celui qui convient sans me défaire des autres qui deviennent alors la résonance de ce qui s’éteint. Valeurs cuivrée des choses, valeurs sensibles de ce qui ne s’atteint.
Ce qui m’aide à le choisir est un principe, le même sans règles ni formules que celles qui se devinent et se découvrent dans les dessins d’une rose. Il me faut bien occuper l’espace, meubler la seconde, developper un mouvement d’espoir.
Ce qui est dérisoire, c’est de ne plus croire, de ne plus grandir, de ne pas vouloir revenir et devenir. Si l’aveuglement existe, je l’appelle désespoir. S’il persiste, je le dessine en noir. Je le peints pour qu’un point le scelle. Dans mes pupilles les trous noirs de mon univers maladroit.
Refermons la fenêtre, cette parenthèse sur moi-même pour que je regarde ce qui se passe au delà. Vagues, vents, lumières et mouvements bleus. Soleils dans les oliviers, pinsons dans les pins et à l’orée du jardin, cette fleur, cette ombre chinoise de velours noir, le petit chat qui s’exerce à la tranquillité.
C’est un pays où la lumière ne vient que pour marquer les plis des feuilles recroquevillées et signer les chemins d’un filet si fin que l’on dirait les rides faites aux ondes. C’est le pays où tu apprivoises les questions sans réponses, les chevaux sauvages, l’évaporation de leur crinière dans l’espace, le temps qui ne fait que déborder du vase le contenant. C’est là, tu caresses du regard le vent avant qu’il ne devienne une tornade ou ne résorbe ce qu’il te reste de force. C’est l’endroit à fleur de peau, où tu t’efforces de traduire, de polir les paroles qui grésillent dans cette autre langue que personne ne comprends. Toi, seul, tu vas escalader les pays inviolés de la solitude, aucune crevasse ne connait pas la forme de tes doigts, aucune galerie n’ignore la lueur de ce regard qui t’accompagne comme une ombre fidèle. Tu reviens les bras et l’âme chargés de cartes précisant les voies, contournant les impasses. Ton coeur devenu astrolabe, tu espères vaguement qu’il dicte la mesure des lunes et des étoiles, murmure presqu’inaudible aux foules qui te regardent comme un animal étrange et de mauvaise augure.
La mer est telle que le ciel
est devenu un fantôme
au loin les îles sont des pièces d’étoffes bleues
épaules bras hanches mains étaient des calanques
la mer tellement souple
ses vagues
à peine soufflent une suite
à la nue
se soulève en moi l’immense doute
depuis que je suis née ce poulpe
glisse son amertume dans mes soutes
la mer fille des flammes
pleure