Un trait de lumière dans la nuit unit nos frontières
le transparent ruisseau du ciel essoufflé s’écoule
lentement se dissimule sous les draps
l’empreinte fraîche de nos pas
sur les berges immaculées
des étoiles
Blonde Wolken Constant Permeke
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Aux abords de la ville
le fleuve saigne
dans les prairies
ses voies se noient
dans le ciel ébloui
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comme des étoiles
dans la nuit
on peut compter les morts
◊
en regardant le visage silencieux
de l’horizon affamé de collines
on s’égare
on évite d’accrocher ses pensées
aux clochers des églises
plantées dans le vent et la pluie.
Les mots apparaissent comme des astres lunaires à la surface des textes. On ne voit que leurs lueurs flotter dans la nuit. Rien de plus.
Pourtant, chacun est parcouru de cratères et de collines, de pleins et de creux. Des veinules les retiennent et les soudent à la vie. Repliés sur eux-mêmes, les mots masquent leurs origines et leurs trajectoires mais dès qu’ils se développent dans une phrase, on commence à les apercevoir, à deviner leurs devenirs, à leurs supposer des orbites.
Les veinules comme de petites racines assurent nourriture et attachement. Elles fraient des chemins, permettent des voyages en même temps qu’elles les freinent. Retirer l’une de ces petites voies c’est amputer les mots et puis les phrases de leurs histoires. Ils ne résonnent plus, ils boitent, ils suffoquent ou deviennent froids. Les sphères dans lesquelles les mots évoluent sont à la fois d’une harmonie complexe et solide et d’un équilibre fragile.
Vos mots appartiennent à une autre galaxie que la mienne : ils sont d’une autre intelligence. Pourtant, de loin, je les admire sans toujours les comprendre, sans être capable de les atteindre. Je me console du mystère qu’ils préservent et que je ne percerai pas en contemplant les ténèbres de mes propres mots.
Ainsi, je ne creuse plus de ravins, c’est comme si je parcourais l’infini. Il n’y aurait plus de différence entre vous et moi, car dans la plupart des cas, nous ne savons pas ce que les mots nous cachent.
Northern Lights, by Steve & Chris Rocks
Dans la nuit des feuillages
l’orage vit et meurt
les fleurs comme des araignées
grimpent jusque dans le ciel
autour des flaques
les arbres forment des prisons
c’est ainsi que naît un paysage
il est fait de coulées d’eau
de ravinements
et de très peu de lumière
Joseph Piccillo #15-2009 mixed media on canvas
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Dans le cercle de feu des applaudissements
le silence de mon encolure
ma docilité nue
froisse les tissus de sable
et comme une trace blanche dans la nuit
mon dos mes crins
s’échappent savamment
de ta main.