Forêt

© Bertrand Elsacker

Dans la forêt d’eucalyptus il n’y a plus personne

quelques pins et leur broderies d’aiguilles 

un silence d’écorce et parfois quelques plumes

la cime sert de nid au milan

il miroite au soleil parmi mille feuilles

éclaboussées par le soleil

Aujourd’hui on entend la mer

filtrer la lumière

avant de se mélanger aux saveurs automnales

du maquis 

Pourparlers

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Pour parler 

De la mer les vagues 

L’attraction amoureuse d’un astre

Qui ne sait que se taire 

Le temps fait de grains grignote 

La lumière ou ce qu’il en reste 

Lorsque enfin me parvient l’onde

Qui témoigne d’un effondrement sidéral 

Pour parler de l’animal en moi

Une âme muette minérale 

Qui se persuade qu’il n’est jamais trop tard

Mis en échec

Au loin le mât d’un voilier

comme s’il s’agissait de son squelette
rogné
mais la pluie soudaine rappelle un bruit d’étoffe

la musique de corps qui se confrontent
la coque les flots le bois et l’eau le sel le ciel 

le vent

à ce moment-là

j’aperçois uniquement mon désarroi

le mât n’est pas 

c’est une grue de chantier

en train d’effacer ce qu’il restait de sauvage

à une poignée de rochers surplombant

la mer

Le chat

Differantly (DFT) via creapills.com

Par la fenêtre   il regarde les vagues
certaines halètent en prévision de la plage
d’autres repartent

Dès que la porte s’ouvre  il bondit vers l’air   libre
il saute sur la table où sont posés des légumes et des fruits
l’odeur des végétaux l’intrigue   il décortique le message qu’ils ont pour lui
provenance     fraicheur et quelques détails sur le propriétaire de l’endroit où ils ont grandi

Il va rêveur de par ses chemins habituels qui favorisent de longues trainées d’ombres    Il va évitant les flaques de soleil   Quelques sifflements annoncent sa présence aux autres habitants du jardin  Personne qui ne sache que son errance a commencé

Le vent mélange les murmures entre eux   Ceux des vagues ceux de l’eau ceux des feuillages et ceux du temps qui passe 

Il va silencieux Il sait que ses pas et ceux de l’éternité ont quelque chose à se confier
         un mot enrobé de patience     un mot qui ressemble à un miaulement qu’il est le seul à comprendre.

Matière

Au delà du ruisseau et de son peuple de roseaux
Au delà de la pinède de ses sentiers réduits au silence

La mer ses vagues qu’elle lance comme des flammes

Au fond de moi habitée du crissement des branches et de la pluie d’aiguilles à peine Transparentes

La même colère étrange
S’étoffe

Interminable voyage

Le ciel avait entrepris cet interminable voyage
qui va de la mer à l’horizon
et de l’horizon jusqu’aux premiers récifs
qui révèlent l’île aux vagues nouvellement nées

La caravane de nuages s’est arrêtée dans la baie
bien avant d’atteindre les montages dont les sommets sont semblables à la mâchoire béante d’un grand saurien carnivore.

il est trop tard pour disparaitre les nuages trop fatigués pour pleuvoir
dormir comme des agneaux sur le flanc des collines est ce dont chacun d’entre eux a besoin.

mais que faut-il faire du destin qui les titille et force la progression

attendre 

est un des mots que le vent ne connaît pas.  

Assez

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En mer parfois se dessinent

des vagues qui sont des dauphins

des vagues qui ne sont rien

qu’elles-mêmes 

des vagues qui se forcent à naître

l’une de l’autre

des vagues qui ne parlent que la langue

fine et muette sombre et profondément chaude

des cétacés 

En silence

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Bertrand Els @hardcorepunkbf

Dehors
le vent la pluie
la nuit
ont fait disparaitre
la colline la mer
le ciel
se froissent et soupirent
s’extirpent
des ombres qui les aspirent
le ciel a peur
de ses fantômes
de leurs cris
de la disparition

ici mon cœur
redoute
de se faire entendre
marche
comme un chat
sourd se suspend
à la branche qui fait de lui
un bourgeon
en silence