Les mots apparaissent comme des astres lunaires à la surface des textes. On ne voit que leurs lueurs flotter dans la nuit. Rien de plus.
Pourtant, chacun est parcouru de cratères et de collines, de pleins et de creux. Des veinules les retiennent et les soudent à la vie. Repliés sur eux-mêmes, les mots masquent leurs origines et leurs trajectoires mais dès qu’ils se développent dans une phrase, on commence à les apercevoir, à deviner leurs devenirs, à leurs supposer des orbites.
Les veinules comme de petites racines assurent nourriture et attachement. Elles fraient des chemins, permettent des voyages en même temps qu’elles les freinent. Retirer l’une de ces petites voies c’est amputer les mots et puis les phrases de leurs histoires. Ils ne résonnent plus, ils boitent, ils suffoquent ou deviennent froids. Les sphères dans lesquelles les mots évoluent sont à la fois d’une harmonie complexe et solide et d’un équilibre fragile.
Vos mots appartiennent à une autre galaxie que la mienne : ils sont d’une autre intelligence. Pourtant, de loin, je les admire sans toujours les comprendre, sans être capable de les atteindre. Je me console du mystère qu’ils préservent et que je ne percerai pas en contemplant les ténèbres de mes propres mots.
Ainsi, je ne creuse plus de ravins, c’est comme si je parcourais l’infini. Il n’y aurait plus de différence entre vous et moi, car dans la plupart des cas, nous ne savons pas ce que les mots nous cachent.
Quel superbe texte. Je le lirai encore souvent, m’y arrêterai comme devant une étoile à laquelle je ne peux que penser sans jamais l’atteindre …, sachant que ce n’est qu’à ce prix qu’elle brille pour moi.
En remerciement, ce petit extrait d’Eugenio de Andrade:
Même le plus friable
des mots
a des racines dans le soleil –
comme le matin
des barques sur la mer. – Le poids de l’ombre XII. –
Quelqu’un vous a proposé de contacter la revue « Traversées ». Je ne peux que vous le conseiller et le souhaiter pour cette revue tenue par des amis exigeants mais désintéressés et sincères. (Contact: patricebreno@hotmail.com)
Bien cordialement Claude Miseur
Ce texte est la meilleure réponse que j’ai pu formuler à la lecture des très justes et sincères poésies de vos amis. Je ne manquerai pas de leur envoyer mes écrits en espérant que cela leur plaira. Merci à vous. Merci pour ce fabuleux extrait.
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