Roncier

Bertrand Els

L’embrigadement de moi-même par les idées sombres

des ronces et
cette forêt malade où se disloquent les jours les heures les secondes
toutes les semaines de l’année me prennent à la gorge

A quoi vas-tu renoncer? Je grince

A rien puisque en dehors des épines des sentes embourbées je ne possède rien

qu’une nausée 

mon coeur mon âme ou ce qui portait ce nom au goût autrefois si fort

part en fumé

partout comme un grand brûlé regarder depuis les rochers
les eaux bleues et froides
pour se calmer

tous les silences auxquels je ne sais
comment renoncer

Quelques mots

Bertrand Elshttps://elsacker.tumblr.com/post/165255080876

 Ce ne sont pas quelques mots 

Acides secs urticants

Qui la feront disparaître

Elle s’apaisera la passagère en moi

Elle se fera silence jusqu’à nouer ses bras

Tordre ses sens pour qu’on ne l’aperçoive pas divaguer 

Et puis gavée tellement brûlante 

Elle naviguera médusée
à nouveau parmi les cendres les braises mourantes

Semblant être libre 

Alors que vibrent des verbes qui la malmènent

C’est sans doute trois fois rien 

Elle comme une anguille 

Comme un batracien 

Impossible à dire quel monde lui convient

Et puis

ഞാൻആരാണ്

La pluie et ses milliers de petits sabots qui galopent sur le toit

tous ces pas qui touchent la nervure centrale d’une feuille

la pluie amplifie et puis peu à peu assouplit sonde élucide 

les signes et les empreintes ne sont plus que des flaques

des lacs où ne naissent jamais qu’à demi-mot des reflets

des ombres, l’idée qu’on se ferait d’une onde la pluie ses 

graines que picorent les araignées quand elles défont leurs

toiles les abandonnent parce qu’elles n’emprisonnent plus 

que la poussière cellulaire des larmes un grain de fatigue un 

grain de désespoir la pluie sonde les puits où stagne mon 

esprit celui qui se dit fantôme habite la ruche des mots vides 

gavés et déviés la pluie efface multiplie hésite se tait burine dans 

la glace un portrait presque parfait de mon âme dragon dont 

les ailes sont des flocons dont le langage est un feu

feu mot feu paradoxe feu miracle feu silence la pluie fourmille 

l’insecte est plus vorace qu’une maladie la pluie de plus en plus

vieillie ne finit pourtant pas par mourir 

Lys

source image 

En cet endroit du monde

on a coupé le bras de la rivière

parce qu’il perdait son temps à vouloir abreuver les terres

à rassembler d’improbables troupeaux de cendre il négociait avec les nuages un silence

Depuis l’eau croupit l’eau sombre dans la lenteur

Depuis plus rien n’emporte les fleurs le cordon ombilical des nénuphars

n’est plus rompu

La vase est un épais velours noir lourd et doux 

En cet endroit du monde est une source froide 

naissent des mousses et des forêts d’algues

Aux nageurs de fond à ceux qui posent leurs pieds

dénudés au fond de l’eau

est remis en guise de songes

d’étranges messages

que l’on n’élucide pas

que l’on traduit difficilement autrement 

que par des éclats de rire et des morceaux de vitrail