
Dans ta cage, les rayures d’un tigre, l’aileron d’un requin, les dents du monstre.
Je crie.
Personne pour m’aider à t’ouvrir les portes de la vie. Ma fille, ma vie n’a pas suffit d’être sacrifiée.
Personne pour retirer du doute les raisons véritables du trouble qui habiterait mon âme et salirait chacun de mes gestes.
Personne pour déconstruire l’échafaud du préjugé, pour contester le brasier qu’imposent les structures communes de la pensée.
Il faut attendre, se taire et se laisser dévorer, s’abstenir d’intervenir. De quelle vérité sont faits les protocoles ?
En attendant on juge pour moi comment et qui il est bon d’aimer, un homme ou une femme.
On enferme mon âme dans une cellule psychiatrique, dans la prison d’un diagnostic. La maladie dont on a repéré sous la contrainte les symptômes à guérir est un surplus de clairvoyance, un débordement du cœur. Il faut qu’on l’étrangle. Je sers à remplir les grilles, à circuler sur les courbes, à justifier les schémas et maintenir en place les tabous.
Attendre, car il ne faut pas se révolter, il faut laisser parler les docteurs, les juges et laisser les mains libres aux dictateurs, aux gourous.
Attendre qu’ils aient rompu et déchiqueté toutes les racines, toutes les feuilles qui cherchent à construire la différence.
Attendre et faire semblant de croire qu’un jour, les prédateurs cesseront d’avoir des dents, des griffes, une faim qu’ils renouvellent en mangeant.
Attendre qu’ils s’arrêtent de broyer, de mentir, d’usurper. Attendre et devenir le noyau même de l’hypocrisie.
L’innocence devient suspecte. L’amour a tout à prouver alors que la désertification menace et met en place les rouages de l’aliénation.
Hier, on a étouffé mon cri pour la énième fois. Notre silence est devenu un criminel.
Très fort ! Bravo !