Substance

« Beauty of the Brain »

Au milieu de mon pays

inscrit dans l’abandon lascif des rivières,

les fins doigts de ton intelligence

habilement nouent des alliances.

Les petits points précis se rassemblent pour former un chœur.

L’onctuosité bruissante d’un jardin

que l’on met des milliers d’années

à inventer se déploie.

Parfois du dos de ta main, tu fais naître des vagues

semblables aux chants de lumières qui ondoient sur la mer.

Délire

source

Un livre s’ouvre et je découvre brodée de silences, l’âme des phrases. Entre les fils conducteurs de la pensée et ceux de la vie se nouent des alliances nouvelles. Les mots tiennent des promesses, allument les couloirs qu’il me faut traverser, les places où il me faudra rester, les lieux qu’il me faudra transgresser. Suis-je encore le chemin que je m’étais tracé alors que ma volonté est presque toujours sous influence ? Se délaisser au profit de quelques mots pour une image est un tel délice.

D’un versant à l’autre de la réalité, amusées, surgissent les significations. Désuètes, sensiblement parfumées, irradiées, elles m’entraînent à chercher les directions voulues par l’auteur. Je ne peux lire en m’oubliant tout à fait, alors je serpente, je glisse ou me hisse. J’escalade ou je creuse. Je symbolise les avancées commises par l’histoire, je pense. Je m’évade.

Mes souvenirs entrent en scène comme des comédiens, tous sont habillés de vêtements fins dont les couleurs s’altèrent au fur et à mesure des années. Mes souvenirs nourrissent les phrases en dépassant parfois les limites. J’illumine, j’écris ce qui n’a pas été écrit : je me plante entre les lignes, au delà des mots. Je crée des enluminures, du moins, je l’espère.

Dans les nuits dictées par les habitudes de l’intelligence que l’on me suppose et que je n’ai pas, dans les nuits portées par tous les sous-entendus aux quels bien sûr, je n’entends rien, j’impose mes désobéissances comme de petites bulles bleues. Mon aveuglement symptomatique et caverneux m’invite à tisser de nouvelles connexions, à avancer en toute innocence en frôlant l’arrivée.

Je lis de travers, j’écris de travers, je vie à l’envers. Ce que vous prenez pour fantaisie, pour folie et rêveries sont mes réalités. Ce que vous croyez gagner est ce que je perds.

Le temps dans un livre se résume à l’espace qu’on veut lui donner, c’est pour cela que tous se terminent par un point. Il est de ces livres incendiaires, une seule vie ne leur suffit pas, une seule lecture non plus. Il est de ces livres qui me libèrent tout en m’accompagnant, il est de ces livres qui m’invitent à me taire aussi.