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Je ne prendrai pas la parole, je ne hausserai guère le ton mais je me laisserai faire par le silence, la tête dans les épaules avec l’étonnement d’un oiseau. Littéralement emporté par le fil de conversations intérieures que personne même pas moi n’est en mesure de diriger. Voies des rivières, lacets de nuages défaits. Enumérations de souffles, essaims précipités des battements de ma peur.
Je ne me prononcerai pas, j’énoncerai que non, je ne sais pas. Je ferai signe. Sûr qu’on ne m’entendra pas. On lèvera les yeux vers le ciel, la réponse sera un seul et grossier nuage et parce qu’on ne parvient pas au mot cherché, on me chargera de le trouver.
Le bruit ronronnant d’un engrenage, chaque geste est une roue dentelée qui en actionne une autre et encore une autre jusqu’au ressort. Souvent il précipite le hasard. Une petite tape dans le dos, une admonestation mais en moi toujours le silence. Alors cette machine que tu as dans la tête, cette horloge qui ne donne pas l’heure mais la dévore? Que nous dit-elle? Puisqu’elle triture, dépèce, il n’est pas naturel de lui attribuer vie, conscience, usure et mort inexpliquée.
J’éparpille les écumes, je scrute le coeur de cristal enrobé par les vagues, je possède pour quelques instants le kaléidoscope qui les partage. Éclats ou reflets de miroirs, images ou mots sans syllabes. Brutalité de l’absence de césures, apnée de mes langues natales. Je ne reconnais pas les rivages. Alors je me contente de picorer quelques lettres gutturales, les autres s’envolent, les plus légères s’évaporent, quelques unes font un léger bruit de frottements, l’étoffe de l’une contre l’air glaçant d’une autre. Je protège les secrets et puisqu’il vous faut nacelle, air chaud, comme prétexte je ne trouve pour assurer ma tranquillité que cette roseraie où le sens est un bouton, une épine, une pluie de parfums muets et le reste du vide entre les tiges, de l’ombre entre les feuilles, et la mort forme le noyau des racines qui plongent avec tellement de force qu’on pourrait presque croire que ce monde se tient debout.
Ne vient-il pas de s’endormir, de s’étioler parce que, parce que, ce texte est apparu en deçà de moi? Extorqué, est-ce qu’on peut encore s’en satisfaire?