
Entre les mailles bien ajustées des secondes, des heures, des jours, semaines et années, ma vie ne peut serpenter. Chaque parole comporte l’aspérité, l’épine tendue comme une épée. Chacun des sons se termine en plantant la pointe d’un poignard au centre l’ombre que devrait être mon premier pas. Alors, je n’avance pas. Je reste là, comme une plante mes désirs colonisent le temps de leurs branches. Le moindre souffle les fait dévier de leur course. Échanger des idées en silence serait comme échanger de la lumière, de la pluie pour un tout petit bourgeon. Mais non, il est toujours un homme pour vous parler fort de la morale, de votre ignorance et de la force qu’il mettra à vous inculquer la vérité. Il est toujours quelqu’un qui se met à discuter de vos songes sans que vous ne l’ayez demandé. Il agira pour votre bien.
Dans le jardin, la sittelle papillonne, les pas de la tortue font grésiller les feuilles mortes, les aiguilles sèches des pins. Des sifflements remplissent le ciel de rayons de soleil. Et là, sans que je sache pourquoi, comme un regret, mon coeur dépose des larmes. Fini de se battre?