En tourbillonnant dans la neige, la forêt est entrée dans mes bronches. Elle est passée par mes narines et par ma bouche, par mes yeux et au travers de mes mains. Elle a fondu sur ma langue, elle avait le goût du vent et de la nuit.
Par petits flocons, en dispersant ses plumes blanches, la forêt avançait en sautillant sur les routes. Sur les voies d’eau, elle se laissait flotter et puis disparaissait comme une lueur, happée par le fond ou par un cri.
La forêt avait de larges feuilles à étendre, ses nervures me traversaient le front et les joues. Je n’avais pas froid, j’étais incendié. Elle me parlait tout bas en laissant planer le doute, m’autorisait à broder des phrases par petits bouquets. La forêt voulait m’apprendre à la regarder de plus près.
Du ciel, il tombait des larmes d’anges sur mon pays. Cela n’avait rien de triste. Il me semblait que la neige voulait gommer l’hiver. Effacer les arbres noirs, abolir la mélancolie brune des branches et habiller le vent d’un manteau de velours blanc. J’aurai pu penser que la forêt se mettrait à chanter, à danser dans mon ventre et dans mes veines. Mais soudain, j’ai compris que tu étais parti cette nuit, dans les bras de la tempête que j’étais seul à admirer.
J’admire cette vision de la neige