
°
À la surface presque blanche de mon habitacle conçu comme un bouton de rose, on devine l’empreinte de vaines marées. Elles ont laissé les ondes de leurs fulgurantes clameurs s’inscrire dans ma respiration : l’amertume s’est transformée en nacre.
À l’intérieur de moi, elle disperse et transpose le monde glacial, noir et fier en lumières sauvages, en aurores boréales et en collines de soie indomptables.
À me voir précipiter ma si fragile embarcation, on en oublie la raison. M’est-il vraiment utile d’aller plus avant dans l’obscurité éternelle ? Ne devrais-je point me contenter d’être simplement cet animal vivant sa vie dans une petite cuillère vouée à nourrir l’univers de poussière?
Dans le coquillage entrouvert, on voit fidèlement sculptés tous mes visages, mon tronc et ses branches, mes aiguilles pétillent. Les deux versants de moi-même se partagent la matière infime de la vie.
On voit comment ces deux habiles commerçants se disputent un pan du silence et ses fruits calfeutrés dans un simple panier. Ce trésor dérisoire m’a demandé tellement d’efforts, j’ai bu trois fois mon poids de larmes.
Mes songes dans un troisième élan, comme à chaque nouveau départ, m’imposent le doute, me trouent la mémoire. « Que vas-tu faire ? Où veux-tu que j’aille ? Le monde est plein de failles, de coquilles vides et de livres refermés : il n’ y a pas d’espoir. »
J’ai pivoté autour de mon axe, sans complètement me refermer et j’ai souri face à cette autre vue de l’univers, bleue et emblématique, qui gardait accroché à son ultime soupir un tout petit poème de trois ou quatre centimètres.